José Mourinho est entraîneur de football. L’un des meilleurs, même. Mais contrairement à la majorité des ses confrères, il n’a jamais été joueur.
Dans une autre vie, José Mourinho était interprète.
À vrai dire, il était l’adjoint de l’Anglais Sir Bobby Robson, une légende du sport alors entraîneur de Barcelone, pour qui il assurait la traduction en espagnol. Il faut dire qu’en plus du portugais, sa langue natale, Mourinho maîtrise parfaitement l’espagnol, mais aussi l’italien, l’anglais et le français.
Aujourd’hui, c’est lui est traduit dans toutes les langues. Et autant dire qu’il veille au grain. Ainsi, Mourinho est devenu au fil des ans la terreur des interprètes en conférence de presse. L’autoproclamé « Special One » a bâti sa légende sur ses résultats, mais aussi son franc-parler, à mille lieues des poncifs de ses confrères (« Je crois que bon, on a bien joué, l’important c’est les trois points, mais la saison est encore longue »).
Alors dès qu’un interprète ose s’égarer dans sa retranscription, vous pouvez être sûr que Mourinho lui tombera dessus. Ambiance.
Acte I
Septembre 2010. De passage à Auxerre avec son équipe du Real Madrid, Mourinho se voit demander si son équipe méritait de gagner ce soir-là.
Mourinho : We had some matches in Spain where we had 15 chances to score. We didn’t score. We draw 0-0 against Mallorca. We draw 0-0 against Levante. And everybody was saying we didn’t deserve to win because we didn’t score. Today we scored, so today we deserve to win.
L’interprète : D’après l’entraîneur, nous méritons de gagner, malgré les matches nuls contre Levante et Majorque.
Mourinho : Non. [Hilarité générale]
L’interprète : Non ?
Mourinho : J’ai dit que contre Levante et Majorque, nous avons créé 15 situations de but, nous n’avons pas marqué, les matches se sont terminés 0-0 et tout le monde a dit que nous ne méritions pas de gagner le match. Aujourd’hui 1-0. Si tout le monde est pragmatique, OK, nous méritons de gagner le match.
(à partir de 3 minutes)
Acte II
Décembre 2011. Le Real de Mourinho voyage à Amsterdam, sur les terres de l’Ajax. La conférence d’avant-match se déroule en anglais. Dialogue :
Mourinho : I thought the history of my punishment would be a start for a better football. And if I have to be punished for a better football, I would be pleased to do that. But no, it was just for me. Football is the same, people do the same, people are not punished, so it was just for me.
L’interprète : Siempre es un buen sentido estar otra vez aquí en Ámsterdam. Lo que paso puede pasar da cualquier persona y miramos al futuro.
Mourinho : No. Lo siento, no. No he dicho esto. Lo siento. Se no lo entiende, no tengo que repetir. No soy traductor.
Acte III
Décembre 2013. Souvent grande gueule, parfois mauvais perdant, Mourinho peut aussi être beau joueur. (Re)devenu entraîneur du club londonien de Chelsea, Mourinho se déplace en Roumanie. Après une longue tirade, l’interprète roumain passe plusieurs minutes à restituer ses propos. Si on peut légitimement penser que le Portugais n’est cette fois pas apte à juger de la qualité de la traduction (quoique, le roumain est la seule langue latine qui manque au répertoire du « Mou »), il en reconnaît toutefois le mérite. C’est ainsi que Mourinho lance : « Qui paye ce type ? Il faut lui doubler son salaire ! », avant de lui remettre son sweatshirt dédicacé en fin de conférence.
Article très intéressant, même pour ceux qui ne supportent pas le personnage ! ☺
Petite remarque : Mourinho est peut-être doué (ça se discute) mais le roumain (lequel ?) n’est pas la seule langue latine (romane ?) qui manque à son répertoire.
Vous aurez beaucoup de mal à me convaincre qu’il comprend le cadien, le corse, le gallo, l’occitan ou le sicilien pour ne citer que très très peu d’entre elles. Quant à les parler…
D’autre part, Mourinho a probablement une bonne base LEXICALE footballistique dans les langues européennes romanes dominantes, mais il est loin d’en maîtriser parfaitement la grammaire, la syntaxe, les nuances, etc.
Bref vous voyez où je veux en venir 😉
Effectivement, José Mourinho ne laisse pas indifférent. Il est évident qu’il ne maîtrise pas TOUTES les langues latines, et qu’il ne maîtrise pas non plus TOUS les champs lexicaux des langues qu’il parle. Cela dit, il a le mérite de faire l’effort et se débrouille plutôt bien comparé à d’autres personnages du milieu, c’est tout à son honneur.
Un autre « footeux » m’avait fait forte impression dans mes jeunes années, et il a d’ailleurs refait parler de lui très récemment, il s’agit du Brésilien Leonardo. L’ancien joueur du PSG – et ancien directeur sportif donc – maîtrise non seulement les mêmes langues que Mourinho (portugais, espagnol, italien, français et anglais), mais a ajouté le japonais à son répertoire. De là à dire qu’il est parfaitement « fluent » dans chaque langue…