Après une expérience de blocnotage en direct – ou live-blogging – ratée (iPhone et wifi Dauphine ne font pas bon ménage), voici enfin mon compte-rendu sur la « rencontre des auto-entrepreneurs », organisée jeudi 18 décembre à l’université Dauphine en présence d’Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services (rien que ça !).
Je ne reviendrai pas sur le concept de l’auto-entreprise, que j’ai déjà évoqué dans ce billet. Comme tout homme politique qui se respecte, Hervé Novelli est arrivé avec près de 45 minutes de retard pour présenter son « bébé » devant un amphithéâtre bondé (800 places pour 1 200 invités, d’après mon voisin de table). C’est donc François Hurel, délégué général de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes et auteur du rapport sur l’auto-entreprise remis le 10 janvier dernier, qui a introduit cette rencontre visant à présenter ce nouveau régime et à répondre aux questions de l’assistance. Sans surprise, les intervenants nous ont martelés de mots-clefs choisis : « simplicité » du statut, « innovations » apportées, et même « révolution sociale, culturelle, technique et intellectuelle ».
L’auto-entreprise est donc une « simplification extrême de la création d’entreprise » qui se traduit par les innovations suivantes :
- Une inscription ultrasimple, qui peut se faire en ligne sur le site de l’auto-entrepreneur et qui ne nécessite aucune immatriculation auprès des différents registres (un numéro SIRET est toutefois attribué, bien entendu) ;
- Un prélèvement unique, forfaitaire et à la source pour toutes les charges fiscales et sociales. En clair, le chiffre d’affaires réalisés est amputé de 23% pour les activités de services (13% pour la vente de biens), correspondant aux cotisations retraite, santé, etc. et fiscales. [Edit: après vérification, le prélèvement pour les traducteurs techniques, relevant de la CIPAV, se monte à 20,5% du chiffre d’affaires, composé de 18,3% de charges sociales et 2,2% de charges fiscales. Merci à Michel de me l’avoir fait remarquer]
- Une déclaration de chiffre d’affaires mensuelle ou trimestrielle (au choix de l’auto-entrepreneur) qui sert de base au prélèvement.
- Outre l’exemption de taxe professionnelle durant les trois premières années d’activité, il n’y a rien aucun frais à avancer, ni aucune charge à payer si le chiffre d’affaires est nul (le prélèvement étant forfaitaire, 23% de zéro, ça fait toujours zéro) ;
- Les plafonds de chiffre d’affaires (32 000 € pour les services et 80 000 pour la vente de biens) seront relevés tous les ans en fonction de l’inflation ;
- Enfin, il est prévu un accès facilité au crédit, et notamment au microcrédit avec l’aide de l’ADIE. Plusieurs banques ont en outre déjà fait part de leur intérêt pour devenir « LA banque des auto-entrepreneurs ».
Hurel et Novelli ont donc parlé de « révolution sociale et culturelle » car ce statut autorise le cumul d’activités, même pour les fonctionnaires ; mais aussi « technique et intellectuelle » car il favorise l’égalité des chances en étant ouvert à tous et à toutes, quelque soit le niveau d’éducation, la nationalité ou l’âge.
Le ministre s’est ensuite essayé à l’exercice toujours périlleux de répondre aux participants, en compagnie des autres intervenants qu’étaient Maria Nowak (présidente de l’ADIE) ou Jean-Claude Volot (président de l’APCE). Une équipe préparée mais parfois pris au dépourvu par certaines questions. Petit survol des sujets abordés :
Le cumul de l’ACCRE avec le statut d’auto-entrepreneur est-il possible ?
Cette question en a laissé plus d’un dans l’embarras : « possible » selon Hurel, « non » selon l’URSSAF, « à clarifier » selon Nowak : Novelli en fera part à la ministre de l’économie, Christine Lagarde.
Le cumul entre l’URSSAF et le statut d’auto-entrepreneur est-il possible ?
Non. Une option sera proposée aux micro-entreprises pour changer de statut. Les micro-entrepreneurs recevront une lettre du ministère au cours du premier trimestre 2009.
Le cumul d’activités au sein d’une même auto-entreprise est-il possible ?
Oui. Il sera effectivement possible de fournir biens et services (dans le cas d’activités saisonnières par exemple), dans la limite des plafonds de chiffre d’affaires pour chaque activité (soit un total de 112 000 €, dont 80 000 issus de la vente de biens).
Qu’est-il prévu en cas de dépassement des plafonds ?
Le statut d’auto-entrepreneur sera maintenu pendant une phase de transition de deux ans avant un changement de régime (libéral ou entrepreneur par exemple).
Les frais de déplacement et de bouche font gonfler le chiffre d’affaires, mais ne sont pas des revenus ; une disposition est-elle prévue ?
Non. Ce régime n’est pas donc pas favorable à ce genre de situation.
L’achat de matériel nécessaire au déroulement de l’activité pourra-t-il être déduit des prélèvements ?
Non. Tout est compris dans le prélèvement forfaitaire.
Dans une activité comprenant l’utilisation de musique, comment reverser la part de la SACEM ?
Avec beaucoup de réserves, François Hurel suppose que les droits de la SACEM et d’autres organismes semblables sont compris dans le prélèvement forfaitaire, mais cela reste à confirmer.
Peut-on bénéficier de ce régime sans avoir la nationalité française ?
Oui. Les ressortissants communautaires y ont accès sans problème. Les ressortissants hors UE doivent être en règle c’est-à-dire en possession d’un titre de séjour.
Est-il possible de gérer son auto-entreprise depuis l’étranger ?
Cette question (qui m’intéresse pourtant au plus haut point) a déclenché un rire général et la confusion des intervenants, qui « prendront le temps d’étudier ce point ».
Le fameux Kit de l’auto-entrepreneur a ensuite été distribué « en exclusivité » aux participants : celui-ci comprend notamment un guide détaillé sur ce régime, un livre chronologique des recettes et achats, un facturier (modèles de factures) et un DVD reprenant tous ces documents. Une déclaration de début d’activité nous a également été remise, il s’agit d’un simple questionnaire P0 d’une dizaine de rubriques. Tous ces documents sont téléchargeables sur le site de l’auto-entrepreneur, onglet « documents utiles ».
A noter que la rencontre était retransmise en direct dans les locaux de Dauphine, sur le site de l’universitéainsi que sur le site de l’auto-entrepreneur. La vidéo devrait être disponible au téléchargement dans les prochaines heures sur ces mêmes sites. Vous pourrez également trouver d’autres Questions/Réponses sur le site de l’APCE. Je vous rappelle que le statut sera disponible dès le premier janvier ; une nouvelle manifestation est par ailleurs prévue début janvier.
Si vous avez quelques questions ou suggestions, n’hésitez pas à me laisser vos commentaires.
Merci beaucoup pour le compte-rendu Laurent !
Merci ! on en sait un peu plus grâce à toi…
Merci mille fois Laurent! Un beau geste de ta part pour ceux qui, pour de diverses raisons, n’ont pas pu venir à cette réunion.
Ewa
A noter que les traducteurs techniques doivent payer la TVA … (cf annexe II du document « Le guide de l’autoentrepreneur », page 25).
Il est singulier que vous parliez de prélèvements forfaitaires au sujet des 23 % de prélèvements : à ce que je sache, un pourcentage est tout le contraire d’un forfait…
Problème aussi pour le changement de statut en « libéral ou entrepreneur ». Le statut libéral, connais ! Le statut entrepreneur ?!?? :s Koitèsse ?
Dommage pour ces inexactitudes, sinon votre billet a le mérite d’aborder quelques aspects dont on n’avait pas entendu parler.
@Michel: Peut-être n’ai-je pas bien compris l’histoire de la TVA ? Car d’après ce que je vois dans mon guide (p18), les auto-entrepreneurs sont franchisés de TVA. Les traducteurs techniques, relevant de la CIPAV, doivent payer 20,5% de leur CA (et non 23% comme indiqué dans mon billet, je vais changer cela), mais il n’est pas question de TVA. Me trompe-je?
@Sophie: J’ai repris la terminologie officielle qui parle bien de « forfait » et de « prélèvement forfaitaire ». Le statut « entrepreneur » auquel je fais référence renvoie aux microentreprises, très petites entreprises et PME
"le prélèvement étant forfaitaire, 23% de zéro, ça fait toujours zéro"
Ce n'est pas forfaitaire mais proportionnel, justement !
Comme je disais à Sophie, le prélèvement "forfaitaire" est la terminologie officielle du gouvernement. C'est un "forfait" dans le sens où tout est inclus (charges, impôts, etc), mais c'est effectivement proportionnel au chiffres d'affaires. L'un n'exclut pas l'autre !